Hélène, ma belle Hélène, c'est toi que j'attendrais sur ce banc.
Je commencerais par te demander pardon. Pardon de ne pas avoir vu que derrière ton sourire enfantin plein de vie se cachait un profond mal-être. Pardon d'avoir pensé que lors de notre dernier au revoir, lorsque tu m'as dit qu'on ne se reverrait pas les yeux pleins de larmes, j'ai cru que c'était parce que tes grands-parents parlaient de vendre leur appartement et que ça t'angoissait. Pardon d'avoir commencé à t'écrire cette lettre en septembre et d'avoir laissé le temps passer avant de l'envoyer, jusqu'à ce qu'il ne soit trop tard...
Je te dirais à quel point c'était un bonheur de passer toutes les vacances de mon enfance à tes côtés, que je repense encore bien souvent à toi qui, qu'importe le temps, venait frapper à nos portes pour nous proposer d'aller nous baigner. Et je te demanderais aussi pardon de parfois t'avoir dit non... Tu faisais partie des plus jeunes de "la bande", le soir on sortait donc souvent sans toi, mais il y a eu, lors de ce dernier été ensemble, cette fois où tu as eu le droit de nous accompagner pour voir un feu d'artifice. A chaque vacances scolaires, on savait qu'on allait reformer cette bande de copains grâce à cette grande maison de vacances divisée en plusieurs appartements. C'était génial.
Je te demanderais ce fameux "Pourquoi?", même si l'on se doutait bien qu'un lourd secret de famille devait peser sur tes épaules. On a appris certaines choses plus tard, trop tard, montrant à nouveau à quel point tu étais si jeune et pourtant si mature, bienveillante, souhaitant quitter ce monde sans impliquer qui que ce soit...
Et puis tu es passée à l'acte, avant la date que tu avais pourtant l'air d'avoir choisie. Après cette cérémonie d'adieux où ta "famille normande" était présente nous sommes allés chez tes grands-parents et j'ai donc vu cette balançoire qui me hante encore parfois lorsque je vois mes enfants jouer avec la leurs... Alors, comme une sorte d'exorcisme je t'écris ces mots aujourd'hui, 15 ans plus tard, pour te dire que je ne t'oublie pas, que personne ne t'oublie.
Je regarderais ma montre, voyant qu'il ne nous reste plus que quelques minutes et je te promettrais de faire attention aux autres, surtout aux enfants qui n'ont pas la chance d'avoir une enfance facile, je te dirais que je te comprends mais que je regrette ton choix. Et je te demanderais d'embrasser bien fort toutes ces autres personnes avec qui j'aurais également aimé passer une heure sur ce banc.
La vie est faite de pluie mais aussi, heureusement, de soleil et permet alors parfois de profiter d'un bel arc en ciel.
Perdre quelqu'un est une étape difficile, accepter que cette personne ait choisi d'elle même de nous quitter l'est tout autant, voire plus. Faisons attention aux personnes que l'on aime ou simplement que nous croisons dans notre quotidien.
*** Texte écrit et posté en mai 2019 sur lequel je viens de retomber et dont les mots résonnent pourtant toujours autant ***